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19 août 2010

Textes de Mumia Abu-Jamal

 

Juste une autre forme d'impérialisme

(1999)

 "S'ils (les ONG - les Organisations non-gouvernementales) leur est permis de prendre part aux discussions de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC), cela constituera un dangereux précédent que tout gouvernement, toute compagnie globale, regrettera longtemps après les manifestations de Seattle." 

--Business Week magazine

Le spectre de dizaines de milliers de travailleurs, d'environnementaliste, de militants pour les droits humains et d'anarchistes occupant les rues de Seattle était un spectacle émouvant en effet.

Leur opposition à l'antidémocratique et grossièrement affairiste OMC leur a gagné l'inimité des médias affairistes, et la condamnation vocale des politiciens affairistes.

L'OMC, l'organisation qui succède au GATT, fonctionne comme un gouvernement virtuel de l'ombre, en fait un super-gouvernement, qui passe par-dessus les considérations nationales et provinciales qui cherchent à protéger les salaires des travailleurs, assurer des standards environnementaux, et protéger les gains des négociations collectives.

Dans la mesure où l'OMC consiste en une collection de gouvernements, elle protège en fait les intérêts corporatifs : les intérêts principaux du capital, par-dessus tout autres intérêts.

Dans ce contexte, les manifestations furent un correctif bienvenu et puissannt, exprimant les vues du plus grand nombre, et non protégeant les intérêts de la minorité.

On pourrait dire beaucoup de chose sur les très calomniés anarchistes qui ont bouleversés le centre-ville, en attaquant les miroitants édifices du capital.

La presse a sauté sur l'opportunité de les traiter de "voyou", ou de "vandales", impliqués dans de la "violence". Ce qui manque dans les reportages, bien sur, c'est que ces jeunes gens ont attaqués la propriété, pas d'autre êtres humains.

Pendant ce temps, l'État, par sa police, attaquait des personnes, les bousculant, les gazant, les battant et les emprisonnant.

Quelle est, pourrait-on se demander, la plus grande forme de "violence"?

Mais, dans le monde projeté par les médias affairistes, la violence étatique n'est pas une vraie violence.

Seuls les individus non-affiliés à l'État peuvent donc être réellement violents. Quelle folie!

John Cavanaugh, de l'Institut pour les études publiques, s'adressant à une assemblée publique à Seattle au moment des manifestations, a lié les puissantes manifestations anticapitalistes et anti-OMC à un autre acte de désobéissance civile violente bien connu qui a marqué le début de la révolution américaine.

Cet acte de désobéissance civile, maintenant connu sous le nom de "Boston Thea Party", où des américains ont manifesté contre la domination commerciale des britanniques, en obscurcissant leur visage (pour cacher leur identité), s'habillant comme des Indiens (pour cacher leur ethnicité) et en détruisant plus de 30 000 livres de thé britannique, en jetant des boîtes, des ballots et des balles dans le port de Boston.

Leurs griefs?

Une taxation sans représentation.

Pour les britanniques et leurs sympathisants conservateurs, c'était là l'action de "voyous", de "vandales" et de "délinquants" sans aucun doute. Mais quelle fut leur contribution à l'esprit public de la résistance à l'empire britannique?

L'étendue et la largeur du contrôle des corporations capitalistes sur les terres, les ressources et le travail de millions de gens aux États-Unis et à l'étranger (spécialement dans le dit "tiers-monde") rend en comparaison les giefs des colons américains contre les britanniques remarquablement mesquins.

L'OMC est l'instance non-élue, dominé par le privé, qui mine la démocratie dans son existence même.

Ils font les règles sous lesquelles la vaste économie du monde est organisée.

Et tous doivent se soumettre à ce pouvoir économique malgré des lois locales, nationales et/ou régionales disant le contraire.

Cela parce que la seule "loi" qu'ils respectent est celle de la primauté du profit.

Le capital fait les règles; le travail suit leur musique.

Considéré à quel point les flics de Seattle ont créé rapidement (en une nuit en fait!) ce qui fut désigné comme une supposé "zone libre de manifestations" de quelques 50 pâtés de maisons, dans le cœur même d'une ville américaine majeure, pour "protéger" les intérêts d'étrangers, de diplomates et d'hommes d'affaires.

Une "zone libre de manifestations", est nécessairement, une "zone libre du premier amendement", avec l e mot "libre" signifiant aussi peut que le terme utilisé dans la discussion du "libre échange".

Dans quelle partie des États-Unis la constitution américaine ne s'applique pas?

Dans les intérêts de qui un cordon sanitaire fut-il établi? Ceux des citoyens de Seattle, ou ceux des laquais fortunés du capital globalisé?

Seattle a révélé le défaut soulignant le mensonge du grand "miracle" économique des années 1990.

Ça a révélé les craintes et les anxiétés justifiées au cœur de millions de travailleurs américains. Ça a révélé pour qui les politiciens travaillent.

Ça a révélé la nature de la police. Ça pourrait, ça devrait, n'être qu'un début.


La Répression permanente

(2000)

 Selon l'Etat américain, il n'y a pas de prisonniers que l’on puisse qualifier de politiques dans ses prisons.

D'ailleurs, beaucoup d'autres pays ont cette position.

En fait, bien des individus ont été pris pour cible, poursuivis et jetés dans les goulags américains en raison de leurs opinions, de leurs engagements et/ou de leurs actions politiques.

La récente libération de plusieurs indépendantistes Portoricains, à l'issue d'une longue détention dans les prisons fédérales constitue une preuve de la reconnaissance tacite de l'existenœ de prisonniers de guerre.

Ou seraient-ils subitement devenus des prisonniers politiques après une décennie passée dans les prisons américaines ?

Des dizaines de soldats de la Black Liberation Army sont encore aujourd'hui dans les goulags américains, certains depuis trente années.

Sont-ils moins prisonniers politiques que leurs camarades Portoricains seulement parce que le pouvoir politique n'a pas eu le courage de les libérer ?

Geronimo Ji-Jaga n'est pas devenu tout à coup un prisonnier politique parce qu'un juge du comté d'Orange en Californie a décidé que ses convictions violaient la constitution de cet état.

Que dire de ses 26 années d'emprisonnement politique ?

Quand Ji-Jaga a tenté d’obtenir sa liberté de parole des années auparavant, malgré un dossier exemplaire, on la lui refusa pour une seule raison: celle d’être "encore un révolutionnaire".

Et pourtant, les Etats-Unis prétendent ne détenir aucun prisonnier politique.

Il y a aussi les prisonniers politiques de MOVE que l'on peut également appeler, dans le sens exact du terme, prisonniers spirituels.

Ils ont été condamnés à cent ans de réclusion dans les goulags de Pennsylvanie, malgré leur innocence, pour avoir refusé de renier leur adhésion aux enseignements de John Africa, le révolutionnaire légendaire, fondateur de l'organisation MOVE. 
Neuf hommes et femmes de MOVE faussement accusés d'avoir tiré collectivement sur un flic de Philadelphie le 8 août 1978 ont recu la peine maximale tandis que plusieurs autres membres de MOVE, terrifiés par la violence de l'Etat ont désavoué leur allégeance à MOVE.

Ce qui leur a valu leur liberté.

Pourtant les membres de MOVE sont, toujours en prison, 22 années après, parce qu'ils ont trop de principes pour renier John Africa !

Et non à cause de crime. Ne sont-ils pas des prisonniers politiques, spirituels de l'Etat ? Aux Etats-Unis, la loyauté est un crime.

Lorsque le membre de MOVE Ramona Africa osa survivre à l'holocauste urbain du 13 mai 1985, c'est elle et non les meurtriers d'enfants ou les poseurs de bombes de la ville, de l'Etat ou du gouvemement fédéral qui est allée en prison.

Durant sept longues années infernales, Ramona a été enfermée dans les cellules de l'Etat alors que les meurtriers de Osage avenue obtenaient promotions, avancements et éloges. Etait-elle prisonnière de l'ordre politique ?

Il y a beaucoup d'hommes et de femmes qui continuent de croupir dans les prisons américaines et dont les noms nous sont inconnus : Sundiata Acoli, les frères et soeurs Africa, Bashir Hameed, Mondo We Langa, Sekou Odinga, Russell Maroon Shoats, Joan Karl Loaman, Ray Luc Levasseur, Tom Manning, Yi Kikumara et bien d'autres encore.

Pourquoi sont-ils inconnus ? Car il n'y a pas de prisonniers politiques aux Etats-Unis, n'est-ce pas ?


 

Des origines de la haine

(2001)

Contrairement à une opinion très complaisamment répandue, le bombardement - à l'aide d'avions de ligne et de leurs passagers - des tours du World Trade Center et du Pentagone n'a pas débuté le 11 septembre 2001.

Pas plus que cet acte ne relève d'une hypothétique "Guerre contre la civilisation", comme l'ont déclaré spécieusement de nombreux hommes politiques.

S'il est vrai que le rôle des politiques n'est pas d'informer, et que cette fonction incombe normalement aux médias, la préoccupation essentielle de ceux-ci étant de vous vendre leurs produits, ils ne souhaitent pas vous déplaire.

La responsabilité qu'ils assument en priorité ne concerne donc pas leurs lecteurs, mais bien plutôt leurs propriétaires et/ou leurs actionnaires.

Et l'absence d'information, voire la désinformation, qui en résultent, servent au bout du compte conjointement les intérêts industriels et militaires.

Les attaques aériennes suicidaires de New York, Washington et en Pennsylvanie ont véritablement commencé dans les montagnes d'Afghanistan, pendant une guérilla de 10 ans alors conduite contre l'ex-Union Soviétique.

Cette guerre a été fomentée et soutenue par la CIA, qui y a investi des sommes colossales pour entretenir ce foyer insurrectionnel anti-soviétique.

Résultat ?

Dans l'édition du 4 août 1996 du Los Angeles Times, un sociologue algérien a déclaré à un journaliste américain, rencontré à Alger : "Votre gouvernement a participé à la naissance d'un monstre, qui s'est maintenant retourné contre vous et le reste du monde -- les 16.000 Arabes entraînés au combat en Afghanistan se sont transformés en une véritable machine à tuer."

En page 2 de la même édition du Los Angeles Times, un diplomate américain en poste au Pakistan partage cette opinion et déclare : "C'est un exemple démentiel du retour d'une basse-cour au poulailler.

Impossible d'injecter des milliards de dollars dans une guerre-sainte anti-communiste, d'y accueillir des participants en provenance de nombreux autres pays du monde, tout prétendant ignorer les conséquences.

C'est pourtant ce que nous avons fait. Nos objectifs n'étaient pas d'établir paix et stabilité en Afghanistan.

Notre objectif était d'exterminer les communistes locaux et de chasser les occupants soviétiques."

Comment l'Afghanistan, pays aussi pauvre et ravagé par les conflits, a-t-il pu financer son armement ?

Rares sont les citoyens occidentaux au courant du fait que les mujaheddins Afghans sont devenus le plus important producteur mondial d'héroïne ?

A court d'argent liquide, les mujaheddins Afghans ont donc pu troquer leur héroïne -contre les armes dont ils avaient besoin pour se battre- avec les fournisseurs de la CIA, donnant ainsi naissance à une filière de trafic de stupéfiants aujourd'hui connue sous le nom de "Croissant d'Or".

Les Soviétiques chassés, à la fin de cette longue guerre, les insurgés ont regardé autour d'eux, pour constater avec colère que la domination américaine de la région avait tout simplement remplacé la domination soviétique.

Ils ont constaté la persistance de l'occupation américaine des villes-saintes islamiques en Arabie Saoudite, le soutien américain apporté aux états-vassaux arabes non-démocratiques, les ravages infligés à l'Irak, le soutien américain inconditionnel apporté à l'état d'Israël au mépris des Palestiniens spoliés, et leur regard -devenu critique- sur les USA y a découvert le même brutal impérialisme que chez l'ancien occupant soviétique, si longuement et farouchement combattu.

En Afghanistan, l'un des endroits les plus pauvres et rudes de la planète, la population male dispose d'une espérance de vie de 46 ans (45 ans pour les femmes) et 71% de la population est confiné dans l'analphabétisme.

Comment l'insolente opulence des Américains, les plus riches de l'empire global américain, pourrait-elle ne pas les indigner?

D'aussi profondes fractures nationaliste, culturelle, religieuse et de classe, alimentent un ressentiment profond et durable contre la domination américaine.

L'humiliation profonde dont le monde islamique a immensément souffert depuis la chute de l'empire Ottoman en 1922, et pendant l'ère coloniale du début au milieu du vingtième siècle, s'est transformée en une haine puissante.

Aussi forte que celle qui a poussé -après la première guerre mondiale- un simple citoyen Allemand à la conquête du monde entier.

Une aussi grave situation ne doit pas être prise à la légère. La situation en Afghanistan risque de représenter un nouveau tournant dans l'histoire du monde.

N'est-ce pas là une raison suffisante pour tenter de la mieux comprendre ? 


 

Mumia Abu-Jamal :

Journaliste et militant politique afro-américain, il est l'un des nombreux prisonniers politiques qui, à travers le monde, purgent une peine pour un crime qu'ils n'ont pas commis. Mumia est né en 1954 à Philadelphie. En 1968, il est arrêté et battu pour avoir protesté contre la candidature d'un pro-ségrégationniste à l'élection présidentielle.

En 1969, il est chargé de l'information à la section locale du Black Panther Party. Devenu journaliste de radio, Abu-Jamal attire l'attention pour sa capacité à créer des atmosphères dans ses billets qui mélangent le journalisme traditionnel et les préoccupations sociales. Les problèmes de Abu-Jamal commencent lorsqu'il devient un admirateur du groupe radical MOVE. En mai 1980, neuf des membres de MOVE avaient été condamnés suite à la mort d'un officier de police au cours d'une intervention dans un local de MOVE. Cette condamnation avait outragé Abu-Jamal qui couvrait MOVE pour la station de radio WHYY, et ses billets devinrent de plus en plus militants, posant un problème à la station qui finit par le licencier.

En 1982, il est condamné à mort pour le meurtre d'un policier qu'on l'accuse d'avoir commis. Or de nombreux élément viennent contester cette version des faits, par exemple le témoignage d'une des greffières du procès qui aurait entendu le juge dire « je vais les aider à faire griller ce nègre », celui de William Singletary, qui affirma ne pas avoir témoigné en 1982 suite à des pressions policières, et qui témoigna que Mumia n'avait pas tiré sur l'agent de police et qu'il avait vu une autre personne s'enfuir vers une allée.

Après de nombreuses protestations internationales, Mumia échappe au couloir de la mort en Mars 2008, mais reste reconnu coupable.

Site de soutient à Mumia Abu-Jamal : http://www.mumiabujamal.net/

 

 

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